Par Jocelyne Nampry
Chanté Nwel
Chanté Nwel (« chanter Noël ») est une tradition antillaise qui se déroule entre les fêtes de la Toussaint et Noël, notamment en Guadeloupe et en Martinique.
Il s’agit d’un regroupement de personnes qui chante des cantiques de Noël classiques.
Habituellement, cette rencontre se fait dans un cadre familial ou amical, mais s’est généralisée au sein d’entreprises et donne lieu souvent à des festivités publiques.
Les chants de Noël conservent souvent les paroles d’origine en français, et ont des adaptations en créole, et sont instrumentalisés au rythme des Antilles avec l’utilisation du gwo ka, de l’accordéon …ou de la biguine en Guadeloupe.
Histoire
L’origine des « chanté nwel » remonte à la période de l’esclavage aux Antilles.
Le Code Noir imposait que les esclaves soient baptisés et instruits dans la religion catholique.
Pour ces esclaves ce fut un mélange de leur culture africaine et des textes catholiques européens.
Avec l’apprentissage d’instruments de musique accordés à certains esclaves par les jésuites pour les offices religieux.
Événement culturel majeur en Guadeloupe, tout au long de la période de l’Avent, dans chaque commune, les personnes se retrouvent pour célébrer en chanson l’approche de Noël, autour de la crèche kakado parfois (du nom d’une petite écrevisse noirâtre des rivières, que l’on avait coutume de consommer à Noël)
D’ailleurs la fête de Nwel Kakado de Vieux-Habitants est réputée et donne lieu à diverses festivités : cantiques, animations, plats traditionnels, illuminations, élection de la Reine de la crèche et concerts de Chanté Nwel.
A cette période on chante et on consomme des plats et boissons traditionnels : jambon de Noël, scrubb, igname, anisette, sirop de groseille…
Autres temps forts de l’Avent en Guadeloupe, Jarry en fête et Jou a Tradisyon, à Jarry, qui est une grande foire artisanale, culinaire et florale.
Le repas de Noêl
Une tradition anglaise et il faut remonter à très loin dans le temps, ou on mangeait du porc dans toutes les anciennes colonies britanniques.
Historiquement au début de l’époque médiévale, les peuples anglo-saxons ont conquis la Scandinavie et ils observèrent les peuples scandinaves et germaniques célébrer les festivités de Yuletide.
Cette fête de Yuletide était le jour où les Norvégiens célébraient la moitié de l’hiver et Freyr, dieu païen de la fertilité, de la prospérité et du beau temps.
Au cours de ces festivités, ils sacrifiaient un sanglier et consommaient du jambon (symbole d’abondance et de prospérité) tout en implorant Freyr d’avoir une année prospère l’année suivante.
Les Anglais adopterent cette coutume en instaurant le jambon sur les tables et le sanglier sacrifié se retrouvait à la main de Saint Stephen (Saint Etienne chez nous) célébré le 26 décembre (Boxing Day, jour où les Anglais ouvrent les cadeaux de Noël) qu’ils apportaient à un banquet de noël.
D’année en année, cette tradition est perpétuée jusqu’à l’implanter dans les colonies conquises par les Britanniques notamment en Amérique.
Les Américains importaient des jambons de Noël dans les îles anglaises des Caraïbes mais uniquement vers la fin de l’année.
Ces jambons qui circulaient entre îles britanniques intéressèrent alors les Français et Néerlandais qui adoptèrent alors la coutume des îles environnantes.
Plus tard, les îles espagnoles suivront également. Ainsi pour tous dans la Caraïbe, cette odeur des jambons de Noël signifiait la fin de l’année et les fêtes qui y sont célébrées.
C’est ainsi que le jambon de Noël arrive également sur les tables dans les Antilles Françaises.
Et c’est à cette tradition païenne que nous devons la tradition du jambon de Noël.
A noter également que la bûche de Noël est aussi liée aux festivités de Yuletide.
Elle est d’ailleurs appelée « Yule log » dans les colonies britanniques.
Ironie de l’histoire, c’est que le jambon de Noël ne fait plus partie du repas traditionnel anglais remplacé par la dinde par Henri VIII.
Le jambon de Noël Américain était livré fumé et salé pour des soucis de conservation.
Ensuite il était dessalé dans de l’eau durant 3 à 4 jours.
Jusque dans les années 70, les jambons étaient conditionnés dans des chaussettes et stockés dans des caisses en bois pour faciliter les expéditions.
Puis c’est congelé qu’ils arrivent d’Amérique mais nécessitent toujours une longue étape de cuisson avant consommation.
Et c’est dans les années 80 qu’une entreprise martiniquaise propose à la population un jambon de noël issu de la production locale.
L’entreprise « Marion » va proposer un jambon pré-cuit avec ou sans os, imité en cela par d’autres entreprises locales.
A noter qu’avant cela, les Antillais procédaient eux-mêmes à l’abattage d’un cochon qu’ils engraissaient une année durant en conviant leurs proches à en profiter.
Aucune partie du cochon n’était jetée.
C’est ainsi que sont apparus le boudin, les pâtés salés ou encore le ragoût de porc.
Bain démaré
Le rituel du « démarage » consiste en un bain de mer qu’on prend à des dates précises : le premier vendredi treize, un jour pair, un jour de pleine lune, ou le jour de l’an. « C’est selon les croyances de chacun ».
Beaucoup de personnes profitaient du début de l’année pour prendre un bain démarré afin de se délivrer de toutes impuretés, de toutes mauvaises choses. |
Le bain démarré se prenait donc le 31 décembre à minuit, ou au 01 janvier
Il débutait par une sorte de petit pèlerinage : tout le long du chemin conduisant à la mer, on récitait des prières.
L’heure venue, on se déshabillait complètement et on se jetait dans l’eau.
On offrait, par sept fois, son corps aux vagues tout en continuant ses prières et en se frottant d’herbages (cives…) et de queues de morue.
Feuillages et queues de poisson étaient ensuite rejetés vers le large derrière soi ou encore déposés à la croisée de deux chemins lors du retour.
Une fois le bain achevé, on se rhabillait et on se souhaitait la bonne année.
On était prêt pour aborder la nouvelle année
Le bain démarré est toujours pratiqué aujourd’hui : à la veille de passer un examen, pour éloigner le « guiyon » ou pour repartir d’un bon pied.
En cours d’année, le bain démarré se prend soit un premier lundi ou un premier vendredi du mois, ou encore après la nouvelle lune.
A l’embouchure d’une rivière
Le bain se passe dans la mer, plus précisément à l’embouchure d’une rivière. C’est un lieu très symbolique puisque le pouvoir purificateur de l’eau est dit plus puissant à cet endroit. « On appelle ça l’entre deux eaux ou les eaux découpées ».
Le mélange d’eau douce et d’eau salée a un effet positif. L’eau de la rivière, en descendant, a rencontré pas mal de plantes et charie tout leur pouvoir. Après ce bain, on ne se rince pas.
Il y a aussi des macérations de feuilles avec lesquelles on se lave lors du bain chez soi.
Des feuilles de raquette, de cassia alata, lavande, zèb’ à fanm, méné vini… qu’on mélange avec de l’eau de fontaine, de l’eau de source et de l’eau de coco et une poignée de sel.
Sur les marchés d’aujourd’hui, il faut venir avec sa liste pour avoir les plantes nécessaires.
Liste établie par un « quimboiseur », une connaissance ou soi-même, si on est déjà initié.
Les feuillages utilisés pour se laver, sont laissés à la croisée des chemins pour que les voitures emportent le mauvais sort, comme le courant l’emporte dans la mer.
L’eau du bain est utilisée pour nettoyer la maison.
Certaines boutiques vendent des préparations spécifiques pour « bain démarage »
A croyances différentes, rituels différents. L’essentiel, c’est que la nouvelle année soit toujours meilleure que la précédente.